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Kelly, hors champs


Kelly Merran

On finit l’année en douceur avec des attrape-rêves et une rêveuse avant Noël. Attention cependant : cette rêveuse-là a les pieds sur terre. Il y a quelques mois encore, c’était même « une machine à réussir », qui menait deux activités de front et évoluait dans un monde d’hyper-croissance : elle aidait les stars-uppers à décoller. Elle accompagnait celles et ceux que Jean-David, notre interviewé de la semaine dernière, reçoit à longueur de journées. Mais Kelly a eu besoin d’air. De beaucoup, beaucoup d’air. De reprendre une liberté qu’elle avait perdue en route. Elle le dit : « J’avais mis les deux doigts dans la prise. C’était une question de survie. » La jeune femme conjugue désormais le spirituel avec le sens des affaires. C’est tout l’enjeu de sa nouvelle activité, la création d’un tiers-lieu baptisé « Miraa » où l’on apprend « tout ce qu’on n’apprend pas à l’école. »


Du chemin de l’hypercroissance à l’aller simple pour la Colombie


Dans son ancienne vie, Kelly a longtemps accompagné des start-up dans leur développement. Elle était salariée en parallèle. Dernier poste en date : Chief Marketing Officer. « Je m’en suis éloignée car le décalage était devenu trop important entre mes valeurs profondes et mon travail quotidien. »


Kelly est partie en quête de sens et la création de son podcast (« Insensé ») est la conséquence immédiate de ce brusque virage. « Insensé » donne la parole « aux êtres libres qui ont choisi d’aligner leurs valeurs, croyances et batailles avec leur projet de vie ». Pour Kelly, ce fut radical. « On m’avait appris qu’il fallait travailler – qu’il fallait transpirer. J’ai aimé ça, ça m’a permis d’aller très loin et très vite. Mais j’avais semé tellement de graines que je n’avais pas vu que tout avait poussé. J’avais des poches sous les yeux qui venaient éteindre mon sourire. Je me sentais prisonnière… et j’ai négocié mon départ du jour au lendemain. J’ai acheté un aller simple pour la Colombie. J’y suis restée deux mois et demi. »


Celle qui a hacké Mark Zuckerberg


L’introspection lui permet de recouvrer un peu d’énergie : Kelly décide de cesser de « jouer un rôle » et de se consacrer à la création d’un nouveau projet, un tiers-lieu qui éveille la créativité. « Miraa » s’adresse à tous les publics, des enfants en bas âge aux seniors. Un changement d’univers ? Oui et non. On retrouve quelques ingrédients-clefs : l’accompagnement, la transmission et ce côté « pirate » qui la caractérise.


Car n’oublions pas que Kelly est cette jeune femme qui a hacké Vivatech 2017 : en modifiant ses données dans l’application de networking du salon, elle s’est fait passer pour Mark Zuckerberg. Une façon certaine de gagner en visibilité sur un événement aussi gigantesque. Certains n’avaient pas apprécié son audace, mais d’autres ont adoré. Kelly avait « tué le game ».


À la conquête de nouveaux territoires


Kelly a choisi l’année où le monde entier se remet en question, pour opérer sa propre transformation. Une mise en abyme dont la saveur n’a pas dû lui échapper.


Le projet initial de « Miraa », sur 800m2, a été dessiné pour Paris. Mais le confinement est passé par là et Kelly a revu ses plans. Marseille est l’heureuse élue, dans un lieu encore plus grand, partagé avec d’autres acteurs du territoire : « L’intelligence émotionnelle et l’artisanat y seront au centre ».


L’adaptation est un muscle à entraîner


En ces mois où la pandémie refuse de nous laisser reprendre le cours social de nos vies, Kelly teste et s’adapte. « Je construis l’école de la curiosité… avec des plans A, B, C… Et une série d’options intermédiaires entre le physique et le virtuel. Comme les publics à qui je m’adresse, je travaille sur mes potentiels inexploités ! »


Kelly est convaincue que l’on peut utiliser l’intelligence émotionnelle dans le business, autant que dans le cercle familial. « Même chose pour la spiritualité et les pratiques artistiques. Nous sommes des êtres complexes, il ne faut pas craindre le mélange des genres. J’ai travaillé sur l’ego, sur le développement personnel. »Elle ne s’est pas contentée de lire « deux ou trois bouquins » : on ne change pas foncièrement et Kelly reste une bosseuse. Elle a creusé le sujet et est entrée pleinement dans sa nouvelle vie. « Le mécanisme du business me passionne, j’adore créer de la valeur, mais pas au détriment de la santé mentale et physique des personnes qui composent l’entreprise. Le monde d’après, c’est maintenant qu’il prend forme, un modèle économique doit aligner les intérêts de toutes les parties prenantes (pouvoirs publics, usagers, salarié.es, associé.es, partenaires, environnement). C’est essentiel pour la survie et l’épanouissement de l’entreprise. Et plus largement : l’entreprise à mes yeux doit être économiquement viable, environnementale, sociale et solidaire. (EESS). Mon fil rouge, c’est d’aider les autres à trouver leur propre fil rouge. J’apporte ma pierre à l’édifice de leur vie. »


On retrouve dans ces mots l’ambition et le désir de puissance qui animent tous les entrepreneurs. Alors, l’utopie et le business, deux chemins finalement conciliables ? On souhaite à Kelly d’en apporter la preuve.

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